''Une intelligence lucide, pratique, une volonté de fer, un talent militaire de premier ordre: il a génie de l'organisateur, le coup d'œil du stratégiste, une opiniâtreté invincible, un mélange de bravoure et de ruse'', tel est le général Sylla vu par Théodore Reinach.
"A moi soldats la gloire de mourir ici! Vous, si l'on vous demande ou vous avez abandonné votre general n'oubliez pas de répondre "à Orchomene!"
UNE ASCENSION FULGURANTE A peine élu, Lucius Sylla se retrouve questeur de Gaius Marius. Le consul cherche à se débarrasser de ce noble que l'on dit sans expérience militaire et qu'il trouve efféminé. Mais Sylla va se surpasser pour lui amener en Afrique un fort contingent de cavalerie. Marius va alors regarder son questeur d'un autre œil. Sylla a tout à apprendre de l'armée et il apprend vite. Son modèle: le meilleur général de la légion romaine, Gaius Marius. Il l'imite en tout: connaître chaque soldat, peiner avec la troupe pendant les marches et les travaux, être présent partout et même avant qu'on ne lui demande. Bref, il se rend rapidement indispensable. Désireux de devenir au plus vite un soldat accompli, Sylla se bat en première ligne et ne se ménage pas. En à peine un an de campagne, Sylla acquière l'expérience d'un vétéran et l'autorité nécessaire pour commander aux soldats. Jugurtha, pensant voir en Sylla un jeune patricien arriviste et inexpérimenté, croit à tort que son unité de cavalerie est le point faible de la légion romaine. Au contraire, c'est son point fort. L'aile de cavalerie commandée par Sylla permet à Marius de remporter la victoire. En définitive, Sylla obtint l'estime de Marius: jamais il ne disait de mal de lui ou contredisait ses ordres. Sylla fut un questeur loyal envers son général et Gaius Marius finit par lui confier le commandement du camp en son absence. LA RUSE PLUS QUE LES ARMES La force principale de Sylla, c'est son sens stratégique: il s'adapte toujours aux circonstances. Lorsqu'il faut combattre, il sait lorsqu'il faut lancer l'offensive ou attendre plutôt que d'envoyer les légionnaires se faire massacrer. Et lorsqu'il faut négocier, il sait faire preuve de toute la diplomatie nécessaire. Jugurtha est insaisissable? Il force son allié Bocchus à lui livrer en échange d'un tiers du territoire de la Numidie. Copillus le Tectosage complote avec les Teutons? Il réussit encore à le capturer. Il faut négocier un accord avec les Marses? C'est Sylla qu'on envoie! Mais il ne faut pas s'y tromper: si Lucius Cornelius Sylla est prêt à tout pour gagner ou pour vaincre, c'est pour Rome. Toutes les stratégies sont bonnes: la force, les menaces, la corruption, l'amitié, la ruse. La ruse surtout. Ainsi, pendant la Guerre Sociale, lorsqu'il découvre l'armée de Mutilus devant lui, il n'hésite pas à faire croire à une trêve! Et Sylla devait posséder un sacré pouvoir de persuasion pour que Mutilus puisse croire en la sincérité de ce geste! Sylla utilisa encore la même tactique lorsqu'en Grèce, il découvre l'armée de Taxile. Il osa même leur faire des propositions de paix et les Pontiques le crurent sur parole! Et quand l'affrontement tournait au désavantage des Romains, Sylla se débrouillait pour faire passer cela comme un choix stratégique volontaire: ''Sylla, dans un combat, voyant le général de sa cavalerie qui allait se rendre à l'ennemi avec une partie de ses gens, feignit que c'était par son ordre, pour exécuter quelque trahison, ce qui augmenta le courage des siens. Une autre fois que ses troupes auxiliaires avaient été enveloppées par les ennemis et taillées en pièces, il dit qu'il les avait engagé là à dessein, pour s'en défaire, parce qu'elles méditaient une révolte. Ainsi, déguisant sa perte sous une feinte vengeance, il rassura ses gens au lieu de les intimider'', rapporte Frontin. LE MEILLEUR EN LOGISTIQUE Sylla a été questeur de Marius, puis proquesteur pendant la campagne d'Afrique. Gaius Marius, qui hésite à voir en Sylla un ami ou un ennemi, le prend comme son principal légat dans la guerre contre les Cimbres et les Teutons. Mais, après la capture de Copillus, Marius le relègue au rang de tribun, puis finit par se passer de ses services après le traité conclu avec les Marses. Plus Sylla multiplie les succès, plus Marius tente de lui faire de l'ombre. Peu importe, le nouveau consul Quintus Catulus le prend pour légat. Pour Sylla et Catulus, la première année de campagne contre les Cimbres est un échec. Cependant, Gaius Marius s'est gardé les meilleurs troupes pour son armée, à charge pour Sylla d'en recruter une autre. En effet, Caius Marius à beau avoir réformé l'armée romaine pendant la campagne d'Afrique, il n'y serait jamais totalement parvenu s'il n'avait pas eu Sylla avec lui pour faire appliquer ses réformes. Quant il s'agit d'organiser une armée, des ravitaillements, ou toutes autres sortes de choses, Lucius Sylla est le meilleur logisticien de la légion. Et Gaius Marius finit par devenir jaloux de la réussite de son légat. Sylla continue pourtant à obéir aux ordres de ses supérieurs et Il n'a pas protesté quand Marius s'est adjugé pour lui seul le triomphe dans la guerre contre Jugurtha. Et il ne dit rien non plus alors que le même Marius assure avoir battu les Cimbres avec son armée de vétérans alors que c'est celle de Catulus et de Sylla qui a été décisive dans la victoire. Sylla aurait-il comme ambition de rester un simple légat? LA TOGE OU LE GLAIVE? Qu'est-ce qui pousse Sylla à vouloir être élu préteur ? Veut-il seulement poursuivre son cursus honorum ou a-t-il déjà en tête l'idée de se faire remettre un commandement proconsulaire plutôt qu'une province paisible à gouverner? Lorsque le consul Porcius Cato décède, le sénat lui remet son commandement militaire. Etre général de l'armée romaine, voilà ce qui motive Sylla plus que tout autre chose. En outre, à chaque fois que Sylla se fait élire, il obtient immédiatement un gros commandement militaire… Sylla préfère le glaive à la toge Hasard de la Fortune? Lucius Cornelius Sylla est plus intéressé par les campagnes militaires que par la politique mais… pour détenir l'imperium, il lui faut impérativement se faire élire avant. Et Sylla savait jouer de ses appuis politiques, ainsi que sa rivalité ouverte avec Marius, pour obtenir les commandements qu'il voulait… Au fil des commandements attribués à Sylla plutôt qu'à lui, l'inimitié de Marius finit par se transformer en rancune tenace, puis en haine. L'ARMEE DE SYLLA Quelle différence existe-t-il entre une légion commandée par Gaius Marius et une légion commandée par Lucius Sylla? C'est encore Théodore Reinach dans sa biographie sur Mithridate qui donne la meilleure réponse: ''Si Marius a créé l'armée nouvelle, personne ne l'a comprise comme Sylla. Sa recette est simple, mais il faut être un Sylla pour l'appliquer: tout exiger du soldat avant la bataille, tout lui permettre après. Ce grand seigneur, si odieux à la foule, fut l'idole de la troupe: nul n'obtint plus de ses soldats, nul ne fit de plus grandes choses avec des moyens limités, mais nul aussi ne contribua davantage à la transformation morale de l'armée romaine. Entre ses mains, le soldat citoyen acheva de disparaître, fit place à un prétorien brave est discipliné, mais avide de pillage, faisant la guerre comme un métier, sans autre foi que l'amour du chef qui savait le conduire à la victoire''. Sylla réclamait l'impossible à ses légionnaires, mais en échange, il leur offrait tout: des villes à piller, du butin, de l'or. Lui se contentait de la victoire et du pouvoir. EN PREMIERE LIGNE Si Sylla demandait le maximum à ses soldats, il combattait lui-même souvent en première ligne. Le sens de l'honneur tenait aussi un grand rôle: que ce soit en combattant Gaius Marius dans les rues de Rome ou sur le champ de bataille d'Orchomène, lorsqu'il sentait que ses soldats reculaient, il s'emparait d'une enseigne des légions et se précipitait au-devant des ennemis. Ainsi, lors de la première marche sur Rome, Sylla ''prit de sa propre main une enseigne, et affronta le péril, afin que la honte d'abandonner leur chef et l'opprobre attaché à la perte de leur enseigne, si elle leur était enlevée, ramenassent immédiatement les fuyards à la charge'', rapporte Appien. Ses légionnaires n'avaient plus qu'à le suivre, à mourir avec lui, ou à vivre avec la honte de l'avoir laissé combattre seul. A Orchomène, lorsque la cavalerie pontique commença à mettre en fuite les légionnaires romains, Sylla, dans un geste héroïque, s'avança en première ligne, sauta à bas de son cheval, saisi une enseigne de la légion et hurla à ses troupes: ''A moi Romains, la gloire de mourir ici! Vous, si l'on vous demande où vous avez abandonné votre général, souvenez-vous de répondre ''A Orchomène!'' A ces mots, soldats et officiers se retournèrent et, voyant leur chef seul, se précipitèrent pour l'aider. Et surtout, Sylla a pu s'imposer auprès des troupes parce qu'il possédait un sens inné de l'autorité. Dur et sans compromis, personne ne discutait ses ordres. Et ceux qui tentaient de le faire, comme Ofella, finissaient par le payer de leur vie. LA RELIGION AU SERVICE DU MORAL DES TROUPES Quand Sylla commença sa campagne quand il était général pendant la Guerre Sociale, il prit conscience de l'impact de la religion sur le moral des légionnaires. Avant chaque bataille, aidé d'un augure, Sylla fait désormais un sacrifice afin de savoir si les dieux seront favorables aux Romains. Avant d'attaquer les légions samnites qui défendaient la ville de Strabiae, il se passa un petit événement qui marqua profondément les esprits: ''L. Sylla, consul pendant la guerre sociale, faisait un sacrifice sur le territoire de Nola, devant la tente prétorienne. Tout à coup, il vit s'échapper un serpent du pied de l'autel. À cette vue, sur le conseil de l'aruspice Postumius, il se hâta de mettre son armée en campagne et s'empara d'un camp retranché des Samnites. Cette victoire fut le premier degré et comme le fondement de la puissance si considérable qu'il acquit dans la suite'', rapporte Maxime Valère. En tant que général, Sylla allait désormais puissamment s'aider de l'argument religieux pour convaincre ses troupes de le suivre: ''Lucius Sylla pour disposer ses soldats à bien se battre, leur fit croire que les dieux lui prédisaient l'avenir'', révèle Frontin. DES STATISTIQUES FAUSSEES Une des autres spécialités de Sylla, c'est sa fausse précision statistique. Ainsi, pendant la Guerre Sociale, lorsqu'il bat l'armée samnite de Cluentius, il dit qu'il écrase près de 50 000 samnites devant Nola, alors que lui n'aurait perdu qu'un seul homme! Et c'est encore un chiffre improbable annoncé après la bataille d'Orchomène: ''Sylla dit que dans son armée il ne manqua que quatorze hommes, dont deux même revinrent le soir au camp'', rapporte Plutarque! En bref, le favori de la Fortune infligerait des dommages considérables aux ennemis et les soldats de son camp ne s'en tireraient qu'avec quelques blessures. PEU DE TROUPES, BEAUCOUP DE VOLONTE Lorsque Sylla doit remettre Ariobarzane sur son trône de Cappadoce, il ne dispose que de quelques cohortes romaines. Il emploie alors toute son énergie à recrutemer, et à force de persuasion et de ténacité, ses troupes atteindront l'effectif assez remarquable de quatre légions, qui poursuivront les Cappadociens et les Arméniens jusqu'à l'Euphrate. Comment fait-il pour réussir à mettre les armées adverses en pièces avec aussi peu de soldats? L'armée romaine prête à tout pour prendre le Pirée Sylla est partout à la fois et joue surtout sur le prestige de la victoire, comme lors de la prise du Pirée: ''Il continuait avec une inlassable énergie, il remplaçait souvent ses hommes, il était partout présent au milieu d'eux, les exhortant et leur montrant que tout leur espoir de récompense dépendait de l'accomplissement du reste de leurs travaux. Les soldats aussi croyant que ce serait en fait la fin de leurs dures épreuves, étaient stimulés au travail par l'amour de la gloire et à la pensée que ce serait un exploit splendide de s'emparer de murs tels que ceux-là, c'est pourquoi ils pressaient l'adversaire vigoureusement'', explique Appien d'Alexandrie. Et plus que tout autre, Sylla est tenace, il ne lâche son ennemi que mort ou vaincu. DE L'OR DANS L'ARMEE ROMAINE Pour motiver ses troupes, Sylla n'hésite pas à leur promettre des monceaux d'or. C'est ainsi qu'il a convaincu les légionnaires romains d'aller combattre Mithridate. ''Du temps de Sylla, au contraire, les généraux, redevables du premier rang à la violence et non au mérite, forcés de tourner leurs armes les uns contre les autres plutôt que contre les ennemis, étaient réduits à courir après la popularité. Chargés du commandement, ils prodiguaient l'or pour procurer des jouissances à une armée dont ils payaient cher les fatigues (…) Sylla fut la principale cause de ces maux; lui qui, pour séduire les soldats enrôlés, sous d'autres chefs et les attirer sous ses drapeaux, répandit l'or à pleines mains dans son armée. Aussi eut-il besoin de sommes considérables pour entraîner à la trahison les soldats des autres et pour corrompre les siens'' explique Dion Cassius. BEAUCOUP D'INDULGENCE AVEC LES SOLDATS Dans l'armée romaine, Sylla était populaire non seulement parce qu'il promettait beaucoup d'or à ses soldats, mais aussi parce qu'il se montrait très indulgent envers eux. Ainsi, lorsque des légionnaires massacrèrent l'amiral Aulus Postumius Albinus à coup de jets de pierres, Sylla se rendit immédiatement sur place, mais au lieu de punir les mutins, il leur pardonne, en leur disant que maintenant ils devraient montrer beaucoup d'ardeur au combat s'ils voulaient racheter leur faute. Ce qu'ils firent… D'autre part, Sylla récompensaient ses soldats de façon extravagante: ainsi, en Asie, il les laissa loger chez l'habitant, à charge pour les Asiatiques de les nourrir, de les vêtir et de leur donner de l'argent! ''Les soldats de Sylla, traités par leur général avec une indulgence contraire à toutes les maximes de nos ancêtres, s'amollirent dans un pays où les voluptés s'offraient de toutes parts en abondance, et où le repos dans lequel on les laissa les invitaient à en jouir. C'est là que les armées du peuple romain apprirent à se livrer aux excès de la débauche et de l'ivrognerie; à prendre du goût pour les statues, les tableaux, les vases ciselés; à dépouiller de tous ces ornements les particuliers, les villes, les temples des dieux; enfin à piller et à enlever sans distinction le sacré et le profane'', déplore Salluste. LES TRVAUX FORCES Les Pontiques Archélaos, Taxile et Doryalos croyaient que l'armée de Sylla s'amollissait en se reposant sur l'or de la Grèce. C'était sans compter sur la discipline de fer que faisait régner Sylla dans ses troupes. Ainsi, si le général romain est parvenu à battre Archélaos dans une première bataille devant le Pirée, c'est parce que des hommes punis revenant de corvées préférèrent se battre et risquer la mort plutôt qu'effectuer les travaux ordonnés par Sylla. Pour Lucius Cornelius, cela devint une habitude: lorsque ses soldats refusaient de se battre, il les condamnait aux travaux forcés. Ainsi, lorsque ses soldats refusent de se battre à Chéronée: ''pour les occuper, il les obligea de détourner le cours du Céphise et d'ouvrir de grandes tranchées. Il n'exemptait personne de ce travail; et, les surveillant lui-même, il châtiait avec la dernière sévérité ceux qui se relâchaient, afin qu'excédés de fatigue, ils préférassent à ces travaux pénibles le danger d'un combat. Ce moyen lui réussit. Ils étaient au troisième jour de cet ouvrage, lorsque, Sylla ayant fait la visite des travaux, ils lui demandèrent tous à grands cris de les mener aux ennemis. Il leur répondit que cette demande venait moins du désir de combattre que de leur dégoût du travail; que, s'ils avaient un véritable désir d'en venir aux mains, ils n'avaient qu'à prendre sur-le-champ leurs armes'' dit Plutarque. Et lorsque Sylla eut fini de reconquérir la province d'Asie, à la fin de l'automne, son armée termina harassée de fatigue, sans même avoir des vêtements pour se prémunir du froid. Sylla employait donc ses soldats jusqu'à l'extrême limite de leurs forces physiques et morales. DEBAUCHER LES SOLDATS DU CAMP ADVERSE Sylla avait un besoin continuel de recruter de nouveaux soldats et il avait trouvé un moyen simple et efficace: débaucher les soldats du camp adverse. Cela commença avec l'armée de Fimbria en Asie: il envoya ses légionnaires creuser des retranchements autour du camp de Fimbria. Pendant ces travaux, les soldats des deux camps en vinrent à discuter, ceux de Sylla vantant évidemment les mérites et les grandes largesses de leur général en chef. Le résultat ne se fit pas attendre: les soldats de Fimbria désertèrent en masse pour passer à Sylla. Cela continua en Italie où Sylla débaucha toute l'armée du consul Scipio! ''Il travaillait à corrompre ses troupes par l'entremise de ses propres soldats, qui, comme leur général, étaient exercés à toutes sortes de ruses et de tromperies. Ils entrèrent dans le camp des ennemis, se mêlèrent avec eux, gagnèrent les uns par argent, les autres par des promesses, ceux-ci par des flatteries'', relate Plutarque. Résultat: même Scipio ignora que toute son armée était passée chez Sylla! Et même au plus fort de la bataille, les soldats désertaient., comme par exemple au cours de la bataille de Sacriport contre Marius le Jeune: ''Au moment où l'aile gauche commençait à céder, cinq cohortes d'infanterie et deux de cavalerie, qui ne crurent pas devoir attendre le moment de la déroute, jetèrent leurs enseignes toutes ensemble et se tournèrent du côté de Sylla. Cette défection marqua immédiatement le début de la défaite de Marius'', explique Appien d'Alexandrie. CHOISIR LE LIEU DES BATAILLES A Chéronée et à Orchomène, alors que les Romains étaient très inférieurs en nombre face aux Pontiques, Sylla se garda bien de les affronter avant d'avoir soigneusement choisi un champ de bataille où il aurait l'avantage. Ainsi, à Chéronée: ''Comme les deux ailes d'Archélaos étaient enfoncées, le centre ne tint plus en place et se débanda. Alors, tout ce que Sylla avait prévu arriva. N'ayant pas la place pour faire demi-tour ni une plaine pour s'enfuir, ils furent repoussés par leurs poursuivants au milieu des rochers. Certains d'entre eux se précipitèrent sur les Romains. D'autres, avec plus de sagesse, s'enfuirent vers leur propre camp. Archélaos se plaça devant eux, en barra l'entrée, leur ordonna de faire demi-tour et de faire face à l'ennemi. Il montrait par là une très grande inexpérience de la stratégie en temps de guerre. Ils lui obéirent à contrecœur, mais ils n'avaient plus de généraux pour les mener ou de chefs pour les aligner ou de gens pour leur montrer où se trouvaient leurs enseignes et ils étaient dispersés çà et là comme dans une déroute désordonnée, sans aucun espace pour fuir ou pour combattre parce que la poursuite les avait amenés dans l'endroit le plus étroit. Ils se laissèrent tuer sans résistance'', dit Plutarque. Et à Orchomène, il fit creuser de larges tranchées afin que les chars adverses ne puissent pas manœuvrer. Ainsi, l'armée pontique perdait tout son avantage. POUR LA GLOIRE Si Sylla se montre un brillant général, c'est surtout les honneurs et les récompenses militaires qui l'intéressent. Ainsi, pendant la Guerre Sociale, lorsqu'il sauve une armée légion romaine à Nola, il reçoit la couronne d'herbe, la plus haute récompense qui puisse être accordée à un citoyen romain. Une vision glorieuse de l'armée romaine Ensuite, il feint de faire croire que le titre d'Imperator ne l'intéresse pas; il ne le reçoit pas à Nola lorsqu'il écrase l'armée samnite. Mais ensuite, il se fait accorder deux fois ce titre par son armée en Grèce et le fait graver sur les pièces de monnaie qu'il fait circuler. A son retour à Rome, il célèbrera son triomphe sur deux jours et les sénateurs lui offrent la couronne civique pour avoir sauvé la patrie. Comme le dit si bien Salluste: Sylla était avide de plaisir, mais plus encore de gloire. DES ATTAQUES ECLAIRS Lorsque Sylla était en infériorité numérique et n'avait pas l'avantage du terrain, notamment pendant la Guerre Civile, il lançait des attaques éclairs. Ainsi, face à l'armée du consul Norbanus: ''sans se donner le temps de mettre ses troupes en bataille, et de leur assigner aucun poste, sans autre moyen que l'ardeur et l'audace de ses soldats'', Sylla lança ses troupes sur les armées de Norbanus et de Marius. Cette bataille-éclair surprit le camp des populares. Les légions de Sylla tuèrent 7 000 des hommes non expérimentés du consul, et en captura 6 000 autres. Puis à Sacriport, face à l'armée de Marius le Jeune, Sylla fit commencer l'édification du camp par ses légionnaires, et une fois les troupes de Marius rassurées et désoeuvrées, il lança ses hommes par surprise sur ces dernières et les écrasa. Et enfin, à la bataille de la Porte Colline, Sylla donne l'assaut alors que le jour tombe et que ses adversaires ne s'attendaient pas à une attaque nocturne. L'ARMEE AU POUVOIR En dépit des efforts immenses que Sylla exigeait de ses soldats, ceux-ci le vénéraient littéralement comme un dieu. Certes, leur général leur réclamait souvent l'impossible, mais en échange, il leur offrait tout: or, terres, esclaves et même une place au sénat! C'est avec Sylla que l'armée prit véritablement le pouvoir à Rome, et inaugura une forme inédite de gouvernement: la république militaire. Avec Sylla, ses soldats obtenaient tout. Pompée réclame un triomphe en dépit des lois? Il l'obtient! Un soldat veut entrer au sénat pour prix de son dévouement à son chef? Sylla lui donne un siège! Un butin de guerre à se partager? Sylla s'occupe lui-même de distribuer les récompenses sur le Forum! Et surtout, Sylla a installé tous ses vétérans, soit près de 120000 hommes sur des terres en Italie, c'est-à-dire que toute l'Italie était durablement aux mains de ses soldats. |