QUINTUS POMPEIUS ASSASSINE

An de Rome 667 (-87): En début d'année, Quintus Pompeius se rend donc au camp de Pompeius Strabo. ''Q. Pompeius, collègue de Sylla, avait eu le courage de se rendre, conformément à un sénatus-consulte, à l'armée de Cn. Pompeius qui depuis un certain temps en retenait le commandement contre la volonté publique'', précise Maxime-Valère. Pompeius Strabo n'était pas heureux de cette nouvelle, mais il accueille bien Quintus Pompeius. ''Le lendemain, au moment où il entrait en fonction, Cnaeus se tint éloigné de lui, comme un homme privé; là-dessus, plusieurs soldats cernèrent leur nouveau chef, comme ayant l'air de vouloir entendre de plus près ce qu'il allait dire, et ils le massacrèrent. Chacun alors prenant la fuite, Cnaeus Pompeius vint à la rencontre des assassins de Quintus; il leur reprocha d'avoir violé les lois en massacrant le proconsul; et, tout en faisant éclater son indignation, il reprit de suite le commandement'', relate Appien. Les soldats avaient désormais le sang d'un proconsul sur les mains…

Lorsque la nouvelle de l'assassinat de Quintus Pompeius fut connu, ''Sylla, commençant à craindre pour lui, ne se montra plus nulle part qu'escorté par ses amis. Il se fit garder par eux pendant la nuit, et, sans tarder longtemps, il partit pour Capoue'', explique Appien. Sylla ne chercha pas à venger la mort de son ex-collègue. Il comprenait très bien que lui-même risquait de subir le même sort maintenant que sa fonction consulaire ne le protégeait plus. D'autre part, ''à peine revêtu du consulat, Cinna n'eut rien tant à cœur que d'éloigner Sylla de l'Italie: il mettait Mithridate en avant; mais en réalité il voulait être séparé de Sylla, pour que celui-ci ne pût épier de près ses projets, ni les traverser'', précise Dion Cassius. Sylla laissa donc le Sénat se charger de venger l'assassinat de Quintus Pompeius. Lui devait venger la mort de près de 150 000 Romains sauvagement assassinés en Asie…

A peine Sylla avait-il quitté Rome que le tribun de la plèbe Marcus Vergilius lui intenta un procès pour atteinte à la majesté du peuple romain, lui reprochant d'avoir soutenu les soldats qui avaient lapidé l'amiral Aulus Postumius Albinus pendant la Guerre sociale. Vergilius était soutenu par Cinna. Mais Sylla était protégé de toute attaque grâce à son imperium militaire, et il ne prêta plus attention à ce qui se passait à Rome. Au printemps, il fit marcher ses légions de Capoue à Brundisium et s'embarqua pour la Grèce.

MITHRIDATE S'EMPARE DE LA GRECE

Pendant l'hiver, Mithridate, retiré à Pergame, est loin d'être resté inactif. Après l'Asie, il veut envahir la Grèce et il n'attend pas la mauvaise saison pour envoyer son second fils, Ariarathe, à la tête d'une grosse armée conquérir la Thrace et la Macédoine. A cette époque, la Grèce n'est pas une province romaine, mais Rome exerce un protectorat sur tout l'isthme grec. Mithridate attaqua la Grèce de toute part. Il envoie Archélaos, son meilleur général, à la tête d'une importante flotte s'assurer de toutes les iles de la Mer Egée. Archélaos prend ainsi l'île de Délos, où se trouve le temple d'Apollon, et s'empare de son trésor. Il le fait convoyé sous bonne garde jusqu'à Athènes, où un certain Aristion doit veiller sur lui. Cet Aristion, qui se disait philosophe épicurien, bon orateur, prit le pouvoir à Athènes grâce aux 2000 soldats que lui avait laissé Archélaos. Il se transforma immédiatement en tyran et fit mettre à mort tous les Athéniens ouvertement favorable aux Romains, mais beaucoup avaient déjà quitté la ville. Aristion était surtout le favori du bas peuple. De son côté, Archélaos se rendit maître de tout le Péloponnèse au nom de Mithridate, puis de la Béotie. Enfin, il marcha vers la Thessalie. Dans le même temps, un autre général, Métrophane, s'empara de toute l'île d'Eubée, puis passa en Thessalie. De leur côté, les Romains n'étaient pas restés inactifs en attendant Sylla. Le propréteur de Macédoine, Gaius Sentius, avec son légat, Quintius Bruttius Sura, résistèrent tant qu'ils purent aux armées de Mithridate et parvinrent à les repousser hors de Macédoine. Bruttius Sura affronta ensuite les armées d'Archélaos et Aristion à Chéronée. La bataille dura trois jours sans être décisive, mais comme Archélaos et Aristion reculèrent un peu, cela laissa le temps à Bruttius Sura de se replier derrière les murs du Pirée, le port d'Athènes.

La situation en Asie avant les conquêtes de Mithridate

Au printemps, Bruttius Sura occupait donc le Pirée lorsque Lucius Licinius Lucullus, le questeur de Sylla, arriva avec l'avant-garde de l'armée romaine, pour lui dire que les affaires de Grèce étaient désormais du ressort du proconsul d'Asie. Bruttius Sura, discipliné, n'avait donc plus qu'à quitter les lieux et il retourna en Macédoine.

LE SIEGE DU PIREE

Sylla débarqua en Grèce avec ses cinq légions, soit 36 000 hommes. Son premier souci est de trouver de l'argent, des vivres et des troupes supplémentaires. Il envoya ainsi ses émissaires dans toutes les villes alentours d'Etolie et de Thessalie, qui lui répondirent favorablement. Pendant ce temps, Archélaos s'était emparé du Pirée. L'idée de Sylla était d'aller affronter directement le général pontique. Aussi, dès que les Grecs lui apportèrent le soutien logistique espéré, il mit ses troupes en marche et passa en Béotie. Sur son passage, les villes grecques se ralliaient à lui, sauf quelques-unes, dont Thèbes. Celle-ci hésita longtemps entre Mithridate et Sylla, et finit par se rallier à Rome lorsque Sylla atteignit l'Attique. Archélaos et Aristion décidèrent alors d'attaquer les Romains. Ceux-ci étaient prêts à en découdre et l'issue du combat fut très favorable au proconsul. Archélaos et son armée se réfugièrent derrière les murs du Pirée et Aristion retourna à Athènes. Tous deux fermèrent les portes et n'eurent d'autres solutions que de se laisser assiéger par les Romains et d'attendre les renforts envoyés par Mithridate depuis la Thrace et la Macédoine.

Arrivé devant Athènes, à la fin du mois de mai, Sylla divisa son armée en deux: une partie des troupes met le siège devant la ville, pour en déloger Aristion, l'autre partie va attaquer Archélaos au Pirée. Le Pirée, c'est un port fortifié, avec des murs épais de 5 mètres et hauts de 18, construit du temps de Périclès. De l'autre côté, Athènes était une ville fortifiée avec une enceinte de 11 km de long, des murs parfois doubles et de grosses tours près des portes d'accès. Entre les deux, les ruines des Longs Murs (6 km de long).

Athènes, le Pirée et les longs murs

Malgré la hauteur des murs du Pirée, Sylla se lance immédiatement à l'assaut du port avec des échelles. La bataille est difficile, les Romains infligent de nombreuses pertes aux Pontiques, mais ceux-ci repoussent à chaque fois les assauts des hommes de Sylla. Le proconsul n'a plus d'autre choix que de renoncer à sa prise rapide du port. Il se retire avec ses troupes vers les villes de d'Eleusis et de Mégare afin de faire fabriquer des machines d'assauts. Son idée est de construire une terrasse, consolidée par des poutres et des pierres, devant les murs du Pirée afin de surélever ses tours d'assauts. Et Sylla ne recula devant aucun moyen pour parvenir à ses fins. Tout d'abord, comme Thèbes l'avait d'abord ignoré, ce fut à cette ville qu'il demanda à être fourni en fer, catapultes, et autres engins de siège. Puis, comme il avait besoin d'argent, il n'hésita pas à aller piller les temples. Il ''fit venir d'Épidaure et d'Olympie les plus belles et les plus riches offrandes. Il écrivit aux amphictyons à Delphes qu'ils feraient mieux de lui envoyer les trésors du dieu, qui seraient plus sûrement entre ses mains; ou que, s'il était forcé de s'en servir, il leur en rendrait la valeur après la guerre. Il leur envoya un Phocéen de ses amis, nommé Caphys, avec ordre de peser tout ce qu'il prendrait. Caphys, arrivé à Delphes, n'osait toucher à ces dépôts sacrés; et, pressé par les amphictyons de les respecter, il déplora, fondant en larmes, la nécessité qui lui était imposée. Quelques-uns de ceux qui étaient présents lui ayant dit qu'ils entendaient, du fond du sanctuaire, la lyre d'Apollon, Caphys, soit qu'il le crût réellement, soit qu'il voulût imprimer dans l'âme de Sylla une crainte religieuse, lui écrivit pour l'en avertir. Sylla fit une réponse moqueuse. Il s'étonnait, disait-il, que Caphys ne comprit pas que le chant était un signe de joie et non pas de colère. Aussi lui enjoignit-il de tout prendre sans crainte, alléguant que le dieu voyait avec plaisir enlever ses richesses et en faisait l'abandon'' rapporte Plutarque.

Le temple de Zeus à Olympie

Le proconsul fit détruire les Longs Murs et utilisa les pierres de l'édifice pour monter sa terrasse. Pour exécuter cette tâche titanesque, 10 000 paires de mulets travaillaient sans relâche. De leur côté, les Pontiques, voyant les manœuvres des Romains, firent la même chose et fabriquèrent des tours de défense. Pendant ces travaux, ''deux esclaves athéniens du Pirée - soit qu'ils favorisaient les Romains soit qu'ils s'occupaient de leur propre sûreté dans le cas où cela tournerait mal, inscrivaient ce qui se passait sur des boules de plomb qu'ils lançaient aux Romains avec une fronde. Comme ils le faisaient continuellement, cela arriva aux oreilles de Sylla qui prêta attention aux missives et en trouva une qui disait: ''Demain, l'infanterie fera une sortie de front sur vos ouvriers, et la cavalerie attaquera l'armée romaine sur ses deux flancs''. Sylla plaça en cachette en embuscade des troupes en nombre adéquat, et quand l'ennemi sortit, pensant prendre les Romains par surprise complète, il fut fort étonné de la force cachée qui l'attendait. Sylla tua beaucoup d'ennemis et repoussa le reste jusqu'à la mer'', raconte Appien. Après cet affrontement, Archélaos chercha d'abord à renforcer ses troupes avant de songer à la prochaine attaque contre Sylla. Il fit ainsi venir des renforts par la mer et, lorsque son armée se trouva supérieure en nombre à celle de Sylla, il effectua une sortie de nuit et brûla plusieurs machines romaines. Obstiné, Sylla fit reconstruire ses tours en dix jours. Pour cela, il s'empara du bois des faubourgs d'Athènes, des jardins du Lycée et de l'Académie où Platon avait dispensé son enseignement.

Les jardins de Platon

Archélaos reçut enfin les renforts qu'il attendait. Mithridate lui envoyait une nouvelle armée par voie maritime et commandée par le général Dromichaitès. Les Pontiques se décidèrent alors à affronter les Romains. Archélaos fait sortir toutes ses troupes, comptant sur ses archers pour infliger de lourdes pertes à Sylla. Le combat est acharné. Les Romains ont d'abord l'avantage et font reculer les armées de Mithridate, Archélaos intervenant en personne pour remobiliser ses troupes. Puis les Romains reculent à leur tour devant la nouvelle charge pontique. Lucius Lucinus Murena, un des légats de Sylla, exhorte les légionnaires à continuer le combat. C'est alors qu'arrivent des soldats que Sylla avait dégradés et envoyés en corvée de bois. Voyant la bataille, ils se ruent avec empressement sur les Pontiques. Ces renforts permettent aux Romains de faire reculer les troupes d'Archélaos jusqu'au Pirée où elles retournèrent s'enfermer. Refusant la défaite, Archélaos resta sur le terrain le plus longtemps possible. Il fallut le hisser avec des cordes tendues par-dessus les murs pour le faire rentrer. Lucius Cornelius Sulla s'estima très content de l'issue de la bataille. 2 000 Pontiques laissèrent leur vie devant le Pirée. Il leva la punition infligée à ses soldats dégradés et distribua de nombreuses récompenses aux autres. Mais l'hiver arrivait déjà et Sylla se retira dans un camp retranché près d'Eleusis, derrière un profond fossé.

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